INTRODUCTION

Les teintes de l’architecture ont un impact fort dans le paysage, et participent pleinement à leur identité et à leur qualité. L’évolution des techniques, des usages de matériaux, et des goûts sociaux, ne doit pas faire oublier que la couleur est un phénomène culturel, qui possède donc une dimension patrimoniale, et qu’en ce domaine les choix individuels ont des conséquences collectives.

Que l’architecture soit ancienne ou contemporaine, les couleurs les plus intéressantes sont souvent celles des matériaux eux-mêmes, dont les nuances et textures s’enrichissent avec le temps.

L’architecture et le style des menuiseries anciennes

En Loire-Atlantique, si certaines régions ou villages ont une tradition de couleurs vives, le bâti ancien a toujours été largement dominé par les couleurs « naturelles ». L’architecture a pendant des siècles eu les teintes des matériaux qui la composaient : gris des bois naturels, beiges et bruns des pierres, ocres roses ou orangés des briques, tons sable des enduits ou blancs des badigeons de chaux, gris bleuté des toitures d’ardoise ou nuances ocres roses des tuiles.

Au XIXe siècle, la diversification des styles et des matériaux utilisés, et la volonté d’ornementer les façades a accru la variété des teintes des constructions : sont apparus des jeux d’enduits et de pierres, des éléments de bois peints, des ferronneries, des terres cuites émaillées, etc. Et les nuanciers de peinture se sont progressivement enrichis.

Il a fallu toutefois attendre la deuxième partie du XXe siècle pour qu’apparaissent d’une part des envies de matériaux bruts, bois teintés ou pierres apparentes, et d’autre part des peintures de toutes couleurs, des matériaux plastiques, puis des enduits teintés dans la masse et pouvant eux aussi être colorés. Le goût pour des façades aux couleurs vives est apparu récemment, et la Loire-Atlantique a vu des façades colorées à la manière de celles d’Irlande ou de Provence, par exemple.

Harmonie entre un badigeon ocre jaune, un encadrement crème et des menuiseries vert moyen.
Coloration douce et harmonieuse pour les façades de ces maisons à Indre.
Verts vifs sur les boiseries et menuiseries d’une villa aux tons de sable, de pierre et de brique.

La coloration offre aujourd’hui une grande liberté, mais reste liée (consciemment ou non) à ces codes et symboles.

Propriétés des couleurs :

Les couleurs complémentaires permettent des équilibres chromatiques. La coloration des modénatures de briques seront ainsi bien mise en valeur par la proximité avec de la végétation (le vert étant la couleur complémentaire du rouge).

Les couleurs « chaudes » et « froides » changent la perception d’un lieu, l’impression de température dans une pièce, mais aussi l’impact d’un volume dans son paysage. Une façade de couleurs chaudes et claires paraîtra plus grande et plus proche, et inversement.

La couleur est ici trop criarde. On préférera des couleurs un peu plus douces pour mettre en valeur cette maison de quai.
L’enduit orangé vif est ici trop prononcé. Les teintes locales des enduits tendent plus vers des teintes plus douces.
La couleur jaune ocre masque les modénatures (corniche, appui de fenêtre, encadrement).

Les teintes des enduits

Les teintes des enduits traditionnels réalisés par un maçon, à la chaux et au sable, dépendent des éléments inclus dans le mélange : couleur et tamisage des sables, présence ou non d’argiles ou d’ocres. Elles vont du beige clair au beige foncé, avec quelques variantes légèrement ocrées, rosées ou orangées. Les enduits à la chaux du commerce présentent des teintes plus variées, dues à des pigments. Dans ces nuanciers, on évitera les tons vifs, jaunes ou oranges, ou les nuances vertes ou bleues qui, à l’échelle d’une façade entière, peuvent se révéler visuellement très violentes.

Les badigeons blancs ou crème sont possibles, s’ils sont réalisés à la chaux, comme l’utilisation de peintures minérales, laissant respirer les murs de pierre.

On pourra peindre les murs en maçonnerie moderne de parpaings, en limitant là aussi la saturation des couleurs qui, un temps à la mode, peut impacter durablement un paysage et lasser plus vite qu’on ne l’aurait pensé.

Lorsque des décors sont présents sur une façade, on les mettra en valeur par des colorations différenciées. Et si au contraire une façade est trop lisse, on pourra lui donner plus de qualité en réalisant des bandeaux d’une teinte différente de l’enduit, autour des portes et fenêtres et au niveau du soubassement.

Bandeau coloré structurant une façade blanche moderne d’inspiration Art Déco. Ce type de dispositif est possible sur des façades plus anciennes du bourg, et peut permettre de leur redonner à moindre coût une qualité architecturale perdue par un ravalement banalisant.
Maison à Paimbœuf. La couleur rouge orangé des murs associée au gris des volets et de la porte, le blanc des pierres des modénatures créent un ensemble harmonieux. La couleur participe de la mise en valeur de cette maison.
Enduit ancien au ton sable, avec encadrements de brique et menuiseries vertes et rouges. On regrette la réfection du soubassement qui, au lieu de ciment, aurait dû utiliser un enduit à la chaux et au sable, avec un grain plus gros et une teinte légèrement plus sombre.

La couleur est une impression subjective et changeante : elle varie avec la lumière, mais aussi selon nos humeurs.

Enduit ancien au ton sable, avec encadrements de brique et menuiseries vertes et rouges. On regrette la réfection du soubassement qui, au lieu de ciment, aurait dû utiliser un enduit à la chaux et au sable, avec un grain plus gros et une teinte légèrement plus sombre.

Les couleurs des menuiseries et ferronneries

Les bois des maisons anciennes doivent être peints (et non « teintés » à la lasure ou vernis) en harmonisant les tons choisis avec ceux des matériaux existants.

Par exemple, la présence d’encadrements de brique fera préférer les tons verts, sombres ou clairs, ou les bleus sombres, et éviter les rouges ou les teintes brunes ou orangées. Des encadrements de pierre claire feront éviter le blanc, qui fait apparaître la pierre plus vieille, ou crème, trop « ton sur ton ».

En règle générale, on prendra moins de risque en préférant des tons pâles ou assourdis comme les verts tilleul ou olive, les gris verts et les gris bleus, les gris clairs, ou à l’opposé en choisissant des teintes sombres (rouge brun, vert émeraude, bleu marine…).

Le blanc est évidemment possible, quand il est utilisé en contraste sur des façades aux enduits sombres, ou recouverts de végétation grimpante, ou aux décors de brique importants. Mais on évitera d’en recouvrir tous les éléments d’une architecture.

Les mélanges de couleurs sur une même façade sont difficiles à réaliser, sauf si l’on utilise la règle du camaïeu (vert pâle et vert sombre par exemple) ou celle du contraste coloré (vert sombre et rouge sombre par exemple).

Les ferronneries, grilles et garde-corps, seront peintes avec des tons sombres (noir, vert foncé, bleu marine, rouge foncé) de manière à les affiner et à respecter les nuanciers anciens de peintures pour métal.

On lira aussi la fiche n° 14 : « Les portes, fenêtres et volets extérieurs ».

Vert franc dynamisant un enduit au ton sable et des encadrements de brique.
Couleur pastel sur une maison moderne aux façades blanches et soubassement de pierre.
Vert sombre et façade crème équilibrant le rouge brique des encadrements d’une villa rénovée.

La couleur, un outil de valorisation de l’architecture

Dans certains cas, la couleur peut apporter une valeur ajoutée à l’architecture si celle-ci prend en compte le bâtiment lui-même et son contexte.

Vieux rose pour cette façade donnant sur les quais de Loire au Pellerin. La coloration participe de la mise en valeur de la façade de ce restaurant. Elle souligne la volumétrie et les modénatures des encadrements des baies.

La couleur permet de mettre en valeur le bâti :

  • en soulignant un volume, une architecture remarquable.
  • en faisant ressortir des modénatures ou un élément ponctuel (porte d’entrée, menuiseries, ferronneries…).
  • en participant à l’espace public (unité d’une rue, équilibre d’un paysage).
  • en créant un repère judicieux, en mettant en scène un lieu singulier…

La couleur permet d’améliorer l’existant :

  • en rééquilibrant une façade, « en gommant » des percements mal proportionnés;
  • en redécoupant un volume (trop haut, trop long, trop massif) ;
  • en redonnant un caractère à une rue devenue banale, à un quartier trop uniforme…

Mais attention, la coloration d’une façade influe sur le cadre de vie collectif. Nos régions possèdent des couleurs et des harmonies propres, à l’échelle de la façade, de la rue, du paysage.